Le premier vers du poème d'Emily Dickinson, écrit en 1859, qui sert de titre à ce nouvel opus, suffit à le nimber d'un inexplicable mystère. Le poème composé de huit vers a servi à l'artiste Quentin Derouet à titrer et à légender chacune des huit peintures présentées en une seule ligne. Le caractère minimal de leur facture ne peut cacher l'intensité des traces laissées par les roses écrasées devenues pigments, teintes ou véritables traces à la corporéité troublante. Elles pourraient figurer des éraflures ou différentes piqûres littérales et figurées. Les huit écorchures ressemblent à ces traces si familières dans la peinture ancienne telles des plaies ou des stigmates : celle de la lance au flanc du Christ, celle aussi qui servait d'emblème à l'incrédulité de saint Thomas ou à saint François recevant les stigmates au creux de ses mains. Elles ne sont pas non plus sans évoquer le geste radical de Lucio Fontana lacérant ses toiles monochromes.
Chacun des vers du poème d'Emily Dickinson sert de sous-titre aux œuvres présentées. Elles orientent le sens ou indiquent, comme les stigmates dans la peinture ancienne, une signification privilégiée : tantôt la blancheur, tantôt l'errance ou l'exil, la mémoire, la poussière ou la brume, le rituel ou encore cette échancrure dans un ciel tel un vêtement rapiécé ou désinvolte.
Vestibule, 2022, cire teintée, acier patiné, 166 x 50 x 100,2 cm, collection MAC VAL –
Musée d'art contemporain du Val-de-Marne.
© Nicolas Brasseur
© Adagp, Paris 2023
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