Glaçage
2 Septembre - 21 Octobre 2023
31 x 25 cm
Titré, signé et daté au dos
160 x 125 cm
Titré, signé et daté au dos
150 x 117 cm
Titré, signé et daté au dos
24 x 30 cm
Titré, signé et daté au dos
40 x 33 cm
Titré, signé et daté au dos
200 x 140 cm
Titré, signé et daté au dos
85 x 120 cm
Titré, signé et daté au dos
60 x 48 cm
Titré, signé et daté au dos
35 x 25 cm
Titré, signé et daté au dos
40 x 30 cm
Titré, signé et daté au dos
35 x 24 cm
Titré, signé et daté au dos
30 x 40 cm
Titré, signé et daté au dos
Titré, signé et daté au dos
90 x 120 cm
Titré, signé et daté au dos
25 x 35 cm
Titré, signé et daté au dos
49 x 28 cm
Titré, signé et daté au dos
40 x 29 cm
Titré, signé et daté au dos
35 x 25 cm
Titré, signé et daté au dos
41 x 29 cm
Titré, signé et daté au dos
Exposition personnelle du 2 septembre au 21 octobre 2023
Vernissage le samedi 2 septembre 2023.
Fermeture exceptionnelle du 28 septembre au 4 octobre
Pour sa seconde exposition personnelle à la galerie, Mireille Blanc propose un ensemble d’œuvres récentes et inédites, emblématiques de son travail sur toile.
L’exposition est accompagnée d’un texte de Margaux Brugvin.
«Si j’aime les œuvres de Mireille Blanc, c’est d’abord pour le sentiment de jouissance qu’elles me procurent. Les pulsions régressives qu’elles déclenchent en moi. Elles me donnent envie de plonger les doigts dans la pâte épaisse de sa peinture, de me bâfrer de sucre et de crème jusqu’à l’indigestion, de me lover dans un sweat confortable aux couleurs pastel, de me réfugier dans des souvenirs d’enfance.
Quand elle m’a proposé de rédiger un texte pour son exposition, je me suis réjouie. Cela signifiait que je pourrais pénétrer dans la cuisine de l’artiste, tout observer, et poser mille questions pour tenter de comprendre par quel sortilège elle transforme des images banales en objets de fascination. J’étais légèrement inquiète, aussi, car ce n’est jamais facile d’exprimer la délectation de la peinture en mots, surtout quand la matérialité de l'œuvre est si importante. Par ailleurs, j’avais déjà noué une relation intime avec les toiles de Mireille Blanc sans jamais rencontrer la peintre, et je craignais de trop imposer ma vision de l’œuvre dans le texte, de trahir les intentions de l’artiste et d’enfermer les lecteurs et lectrices dans une interprétation unique, alors que son travail est si évocateur.
Quelques jours plus tard, en entrant dans la boîte en verre / atelier au fond du jardin de Mireille Blanc, j’ai commencé par étudier les ouvrages et les reproductions d'œuvres posées çà et là. L’origine du monde de Courbet. L’asperge de Manet. Quelques fragments de corps et plusieurs natures mortes. Des peintures denses, beaucoup de blanc et de gris. Ces cartes postales m’ont fait l’effet de photos de famille, qui inscrivent ses œuvres dans une longue lignée d’artistes qui parviennent à retranscrire l’épaisseur du quotidien en posant des pigments sur une toile.
On a parlé des visages effacés de Marlene Dumas, du motif de bouteille peint inlassablement par Giorgio Morandi et de la photographie du quotidien de Wolfgang Tillmans. Elle a sorti des catalogues et m’a montré des images représentant des scènes en apparence anodines, mais toutes teintées de mélancolie. Énigmatiques. J’ai commencé à comprendre quels artistes avaient formé son regard, quelles œuvres l’avaient nourries, quelles fascinations et quels mystères elle poursuit à travers la peinture.
Et puis Mireille Blanc a retourné les toiles entreposées contre un mur. J’ai vu défiler des pâtisseries trop crémeuses dans des assiettes désuètes, des bougies plantées sur des pommes en guise de gâteau d’anniversaire, des nappes à fleurs ou à rayures, des verres vidés, des fragments de corps en arrière-fond ou en périphérie… Et puis des bibelots, similaires à ceux qui prennent la poussière chez mes grands-parents. J’ai longuement observé des peaux de clémentines sur un coin de table et les objets autour d’elles - vaisselle sale et bougie fondue - évoquant la fin d’un long dîner en famille. Des images familières. Des fragments de célébrations, de retrouvailles et de fêtes improvisées.
Certaines images étaient plus mystérieuses. Une œuvre représentant un chewing-gum mâchouillé posé sur une fleur d’hibiscus, par exemple, m'a mis légèrement mal à l’aise. Parfois, aussi, le motif n'apparaissait pas immédiatement sous la peinture épaisse. Je jouais alors à reconnaître. Je prenais du recul puis me rapprochais pour saisir un indice. Je me perdais dans la matière et, tout à coup, il y avait une révélation. Je me retournais vers la peintre, comme une enfant et demandais « un mortier dans un pot bleu ? », « une figurine de chien ? Non, de cheval ?! »
Au bout d’un moment, Mireille Blanc m’a souri. Je me trompais depuis le début. Elle m’a indiqué des tâches, des pliures, des morceaux de scotchs peints. Les images que je regardais n’étaient pas des peintures d’objets, mais des peintures de photographies d’objets.
L’artiste pioche des photos dans des vieux albums de famille ou les capture sur son téléphone ; elle les recadre et les modifie parfois sur Photoshop, les imprime sur une feuille de papier A4, les salit et les altère, pas toujours volontairement. Puis elle les scotche sur un carton et les peint. Des images d’images. Parfois des images d’images d’images.
Le jeu a pris une nouvelle dimension. J’étais heureuse d’avoir été leurrée, et j’ai de nouveau passé en revue les œuvres, à la recherche de ces indices qui m’avaient échappé.
Alors que j’observais le glaçage ravagé d’un gâteau, la peintre m’a expliqué qu’il était à l’origine orné de dizaines de têtes de Timothée Chalamet. Ça m’a fait rire goulument. Je lui ai parlé des glaçages kitchs que mes ami.e.s et moi commandons pour nos anniversaires respectifs. Puis, j’ai reconnu à l'arrière-plan de l’une de ses œuvres un sweat-shirt orné des tournesols de Van Gogh. Je lui ai confié que j’avais offert le même à mon petit frère.
En rentrant chez moi, j’ai réalisé que cette discussion désordonnée autour des œuvres de Mireille Blanc avait révélé davantage de choses sur moi que sur l’artiste. À l’atelier, plutôt que de lui poser toutes les questions qu’il aurait fallu pour obtenir la matière nécessaire à la rédaction de ce texte, je m’étais laissée aller au plaisir des images. J’avais poussé des petits cris en pointant un coup de pinceau ou une couleur, grogné en tentant de discerner un motif, et, surtout, je lui avais raconté plein d’anecdotes.
Elle m’avait pourtant prévenue. Souvent, en observant son travail, les visiteurs et visiteuses de ses expositions pensent à un souvenir intime et lui déballent leur vie. J’étais tombée dans le piège. Particulièrement à l’aise parmi ces images familières et réconfortantes, j’avais moi aussi révélé mes goûts, ou plutôt mes mauvais goûts.
Je me suis alors demandée ce que la peintre avait pensé du fait que j’achète des vêtements de fast fashion sur lesquels sont imprimés en piètre qualité des chefs-d'œuvre de l’histoire de l’art. Qu’est-ce-que ça dit de mon rapport à l’art et à sa marchandisation ? M’avait-elle jugée parce que je commande des gâteaux au glaçage ridicule ? Ou parce que je lui ai confié mon amour pour les vieilles assiettes de grand-mère, achetées en brocante, similaires à celles qui apparaissent dans ses œuvres ? Et que s’était-elle dit quand je me suis extasiée sur les faux ongles lilas qui apparaissent dans l’un de ses tableaux ?
Et puis je me suis souvenue que Mireille Blanc peint d’après des photos qu’elle a prises elle-même. Ces objets que j’ai un peu honte d’aimer, ce sont ceux qui l’intéressent, elle-aussi. J’ai pensé à l’essai d’Alice Pffeifer, Le goût du moche, dans lequel la journaliste analyse la tendance actuelle de toute une classe socio-culturelle à adopter - ironiquement ou au premier degré - un goût qui va à l’encontre de l’esthétique dominante. Mireille Blanc est peut-être la peintre de ce goût du moche.
Après tout, elle a choisi un médium - la peinture - qui était considéré comme parfaitement ringard il y a 15 ans. Elle travaille avec une pâte épaisse, crémeuse, presque écœurante. Elle joue à frôler la croûte. Elle choisit des objets anodins, mais si ils ont en commun d’évoquer un passé commun, elle sélectionne toujours les ratés du goût d’une époque - des artefacts qui ne semblent en aucun cas mériter leur place dans une galerie, et encore moins d’être immortalisés pour l’éternité. Elle joue avec l’histoire de la peinture, son passé glorieux au service des puissants, sa dimension bourgeoise, son sérieux. Elle confère au kitsch le statut d'œuvre d’art, et va même jusqu’à lui offrir les dimensions monumentales d’une peinture d’Histoire.
Cependant, il n’y a aucune posture dans la démarche de Mireille Blanc. Pas de volonté de s’inscrire contre. Elle a un solide bagage théorique, certes, et aux Beaux-Arts de Paris elle a développé un discours qui situe son œuvre dans les enjeux contemporains de l’art. Mais en près de 15 ans de carrière, elle s’est libérée du besoin de justifier sa démarche, de légitimer ses choix. Ce qui l’intéresse, c’est l’acte de peindre. Elle travaille vite, « dans le frais », avant que l’huile ne sèche. Quelques heures pour un petit format, trois jours maximum pour les plus grands. Elle ne retouche jamais. Elle laisse visible les coups de pinceau, la matérialité de la pâte qu’elle manipule. C’est ce plaisir du travail de la peinture qu’elle donne à voir.
Elle se dirige spontanément vers des objets pour lesquels elle ressent - de façon inexpliquée - la nécessité de les transformer en objets de peinture. Elle ne pense pas en série, ni en ensemble. Elle s’étonne d’ailleurs, en observant sa production des derniers mois, de la récurrence de certains motifs. Elle ne sait pas ce que ça dit d’elle, ni de l’époque. Elle laisse aux regardeurs et aux regardeuses la liberté de tisser des liens, d’interpréter, d'analyser et de créer leur propre récit. De jouer, et de se délecter.»
Margaux Brugvin, juin 2023
Mireille Blanc
Née en 1985, Mireille Blanc est une artiste-peintre française. Elle vit et travaille à Évry.
Partant de photographies personnelles ou collectées qu’elle choisit avec une grande part d’intuition, elle s’intéresse aux détails de fabrication de l’image en retravaillant les clichés, pour mener vers un entre-deux entre abstraction et repères mémoriels. L’artiste cherche à faire échapper le sujet initial dans les motifs qu’elle peint en insistant sur les détails et en modifiant les rapports d’échelle, en agrandissant par exemple de petits éléments afin de perdre le regardeur dans l’image et brouiller le contexte. Ce procédé artistique qui se focalise vers l’indétermination des éléments traités, créé ainsi un filtre entre l’œuvre et celui qui se trouve face à elle, et permet l’apparition d’une nouvelle réalité dans l’effacement du sujet premier. Elle fait partie de nombreuses collections publiques, et a participé à un grand nombre d’expositions collectives, comme étant l’une des figures majeures de la jeune scène figurative française.
Elle est enseignante à l’École des Beaux-Arts de Paris.